« Paul Tournal, fondateur de la préhistoire » par Chantal Alibert

 

 

 

 

 

Originaire de la région de Valenciennes, Chantal ALIBERT découvre Narbonne voici quarante ans à la faveur d’un stage archéologique au Clos de la Lombarde et y réside depuis lors.

Enseignante en histoire et en histoire de l’art, elle a soutenu une thèse en 2000 intitulée Les reflets du passé : Narbonne, les Narbonnais et leur patrimoine de 1789 à 1939. Elle est l’auteur d’ouvrages et d’articles ayant pour sujet sa ville d’adoption. En collaboration avec Jean Guilaine, elle a publié un livre consacré à Paul Tournal, le fondateur de la Préhistoire. Elle a également écrit deux romans policiers : Le Manuscrit d’Isis dont l’action se déroule à Narbonne et Canso d’amor qui a pour cadre un château des Corbières après la tragédie cathare. Elle est la scénariste d’une bande dessinée dont l’intrigue se déroule dans l’Antiquité, Jean-Claude Golvin en étant l’illustrateur.

Conférence aux Journées scientifiques en Minervois 2021:

Aux alentours de 1830, Paul Tournal fut le premier à évoquer à partir de ses recherches dans les grottes de Bize (Aude) l’existence d’un « homme fossile » et de proposer une classification de l’histoire humaine aux sources mêmes du concept de Préhistoire. Prenant le contre-pied des traditions bibliques, il avança que seule la géologie serait à même d’élucider la question des origines de l’homme.

Pour autant, sa forte personnalité ne se laisse pas enfermer dans ce statut de préhistorien avant la lettre. Evoquer Tournal, c’est d’une certaine façon porter un regard sur les événements, les idéologies, les passions qui ont traversé le XIXe siècle français et européen. Doté d’une curiosité insatiable et éclectique, tour à tour géologue, botaniste, journaliste, défenseur du patrimoine, homme engagé…, Paul Tournal est un des grands témoins de son temps.

Ami de Prosper Mérimée, de Michel Chevalier, du Baron Taylor, d’Eugène Viollet-le-Duc, de François Arago, grand voyageur à travers l’Europe de l’Ouest, il fut un ardent défenseur de la décentralisation économique et intellectuelle. Saint-simonien, partisan enthousiaste du développement de l’industrie, des chemins de fer et de toute avancée scientifique, il n’en cultivait pas moins une fibre sociale et portait une attention soutenue aux classes pauvres et déshéritées qu’il souhaitait émanciper grâce à la généralisation de l’éducation. Epousant pleinement l’idée de progrès, il fut un parfait honnête homme du XIXe siècle. Révolutionnaires, ses idées le sont assurément et sans doute a-t-il eu raison trop tôt ? Extérieur au milieu universitaire et scientifique officiel, sa pensée ne fut pas reconnue comme elle le méritait.