Journées scientifiques en Minervois 2018: les conférences

 

Ces Journées seront animées par notre association en partenariat avec la Communauté de communes « du Minervois au Caroux ». Elles se constituent de conférences animées par des spécialistes, et des visites sur le terrain, commentées par des archéologues confirmés.

Au programme cette année : le Néolithique, si riche dans notre région, où foisonnent les dolmens (le Minervois est l’une des premières régions d’Europe pour la densité des mégalithes).

Jean Vaquer, enseignant-chercheur (Université de Toulouse-Jean-Jaurès) et directeur de recherches émérite au CNRS, nous présentera le Néolithique d’Occitanie dans son cadre méditerranéen.

Dans sa conférence, il abordera plusieurs thèmes, et tentera d’abord de répondre à plusieurs questions fondamentales : comment sont apparues les premières sociétés agro-pastorales dans le quart sud-ouest de la France (6e et 5e millénaires av. notre ère) et quelles furent leurs relations avec les groupes  autochtones de chasseurs-cueilleurs ? Il évoquera les pratiques funéraires de ces populations et ce qu’elles nous enseignent sur les structures sociales ou les croyances. Il abordera notamment la question du mégalithisme méridional et de ses manifestations dans le domaine des monuments funéraires ou des pierres dressées. Des découvertes récentes permettent de comprendre comment la richesse a été inventée à cette époque : l’acquisition de pièces en matières rares ou précieuses, dont on peut désormais connaître l’origine géographique, telles que les haches polies en jade, les lames en silex taillées et les premiers objets métalliques, justifiait l’existence de vastes réseaux d’échanges.

Jean Vaquer pourra nous accompagner ensuite à la découverte des dolmens des Lacs (Minerve) et des objets néolithiques du musée archéologique de Minerve.

L’an dernier l’atelier de gravure sur marbre d’archéologie expérimentale (ou comment graver des lettres avec des outils et des techniques du Moyen Age) avait rencontré un franc succès. C’est pourquoi cette année, il a paru opportun de renouveler un atelier d’archéologie expérimentale. Compte tenu du thème sur le Néolithique, l’atelier sera un atelier d’archéopoterie, animée une archéologue diplômée de la Sorbonne, Dominique Timsit, qui est en même temps céramiste, et spécialiste de la poterie du Néolithique.

L’argile, l’eau, le feu… et quelques secrets bien gardés ! Peut-on restituer les outils et les gestes des premiers potiers ? Quel est le chemin qui mène de l’argile crue et brute d’extraction à la poterie cuite et prête à l’usage ?  Que nous apprend l’observation des techniques et des décors ?

Après un rapide exposé sur l’extraction des argiles et la cuisson, Dominique Timsit effectuera sous les yeux du public le montage et la décoration d’une poterie à l’aide d’outils reconstitués. Puis elle invitera douze volontaires à expérimenter par eux-mêmes le délicat équilibre entre les contraintes de la matière et des coquillages… (pour cet atelier entièrement gratuit, comme d’ailleurs toutes les activités de ces Journées, l’inscription est obligatoire : 0681568973. Il n’est par contre pas nécessaire de s’inscrire pour les visites et les conférences).

 

L’autre grande période qu’aborderont les Journées scientifiques en Minervois : l’Antiquité tardive, quand notre région était sous la domination des rois wisigoths.

C’est d’abord Alexis Corrochano qui présentera au public ce que nous pouvons apprendre des Wisigoths en étudiant leurs tombes et leur mobilier funéraire. Alexis Corrochano est docteur en archéologie (Paris 1-Sorbonne), il a essentiellement travaillé sur le Midi wisigothique, et étudié tout particulièrement les petits objets (orfèvrerie, tabletterie, perles, …)

Il nous présentera d’abord un état des savoirs sur les nécropoles et les mobiliers dits wisigothiques de la fin de l’Antiquité tardive (Ve-VIe s. de notre ère) dans les actuelles régions Nouvelle Aquitaine et Occitanie. Comment peut-on interpréter les vestiges localisés dans le cadre du Royaume wisigothique de Toulouse ? Grâce à quelques grandes découvertes récentes, principalement dues à l’archéologie préventive, Alexis Corrochano se demandera si on peut ou non caractériser des individus selon leur identité et leurs origines, géographiques, ethniques, culturelles, etc.

Il nous accompagnera aussi au musée archéologique de Minerve pour y commenter les bijoux de la nécropole du Pech (Minerve).

C’est toujours de la période wisigothique, particulièrement riche dans notre région, comme nous l’avons vu lors des précédentes éditions des Journées scientifiques en Minervois, dont nous parlera Jean-Luc Boudartchouk. Ce dernier, historien et archéologue de l’INRAP, n’est pas un inconnu en Minervois, puisqu’il avait collaboré à la première édition des Journées scientifiques il y a deux ans, pour nous présenter le lieu probable de la bataille du mont des Couleuvres à côté d’Olonzac.

Cette fois-ci Jean-Luc Boudartchouk nous entretiendra d’Alaric II et des légendes locales qui s’attachent à ce roi wisigoth. Les traditions associant Alaric II, dernier roi des Goths de Gaule, au massif de l’Alaric, sont généralement considérées comme très récentes et hautement fantaisistes. Pourtant une source auvergnate du XVIe siècle, jusqu’ici inexploitée dans le cadre de cette problématique, a conservé un récit circonstancié et localisable grâce à des microtoponymes, relatif à une escarmouche advenue dans le secteur de Barbaira/Moux ; c’est de ce récit que nous parlera Jean-Luc Boudartchouk.

La troisième période historique à l’honneur au cours de ces journées : le Moyen Age, et très précisément le Moyen Age à La Livinière.

C’est d’abord un manuscrit du XIIIème siècle qui sera présenté au public. Il s’agit d’un document qui a réchappé des flammes lors de l’incendie de la mairie de La Livinière juste après la dernière guerre mondiale. Confiée quelques mois à Marie Vallée-Roche, historienne médiéviste, il apparaît que ce parchemin est une enquête civile de 1269.

On y trouve de longues dépositions d’habitants de La Livinière, questionnés sur l’usage des fours à pain dans le territoire du village. Il apparaît au fil des lignes que les habitants se sont dispensés d’eux-mêmes de payer les taxes dont ils étaient redevables au seigneur pour l’usage du four banal. Qui sont ces réfractaires et quelles sont leurs motivations ? C’est ce que cherchent à découvrir les enquêteurs de 1269. La lecture du manuscrit permet de suivre l’enquête et de poser quelques jalons sur La Livinière au XIIIème s. L’enjeu politique de l’enquête s’inscrit dans un contexte historique bien particulier, et son déroulement nous dévoile quelques aspects du cadre dans lequel évoluaient les Liviniérois.

Ce manuscrit, ainsi que qu’un autre document très ancien de La Livinière, le compoix (ancêtre du cadastre) de 1461, sera présenté dans une petite exposition à la médiathèque de La Livinière par Hélène Arnaud, animatrice de cette médiathèque et membre de Menerbés.

Le document de 1469 a été étudié naguère par Marie-Laure Varoqueaux-Escoffier dans le cadre de sa maîtrise d’histoire médiévale. Il est conservé aux archives départementales de l’Hérault. Marie-Laure Varoqueaux-Escoffier, actuellement à la tête du pôle Patrimoine des médiathèques de Sète, le présentera au public. Pour elle, « il s’agit d’un document qui révèle un village très représentatif du Minervois. Il nous présente une communauté qui s’est bien remise des désastres du siècle précédent : auprès des gros domaines dont nombre ont subsisté jusqu’à nos jours, la plupart des exploitations – blés, vignes, oliveraies, mais aussi prés et safranières – sont encore de taille moyenne. De nouveaux cépages sont introduits. D’importants troupeaux paissent sur le causse. Les redevances seigneuriales ont été allégées. C’est donc un terroir qui semble en bonne santé et a retrouvé un état de croissance démographique. Mais se dessinent peut-être déjà les prémices de crises à venir. »

Après l’étude des documents écrits, place à l’archéologie, toujours à La Livinière, et toujours au Moyen Age, avec Marie-Elise Gardel, docteur en histoire médiévale, titulaire d’une habilitation à diriger des recherches en archéologie médiévale, qui est bien connue dans la région pour avoir dirigé les fouilles de Lastours. Elle nous présentera le castrum de La Livinière, assez caractéristique de la plupart des villages castraux du Languedoc. Un noyau castral circulaire fait face à un noyau ecclésial, probablement antérieur, approximativement de la même superficie : ils témoignent tous deux du regroupement de l’habitat ; une première enceinte est construite autour de l’ensemble, sans doute au XIIe s. L’habitat se développant hors les murs, une deuxième enceinte est alors construite aux XIIIe-XIVe s. Se pose alors la question du rôle des grandes familles seigneuriales, Colonna et La Jugie, toutes deux très puissantes aux XIIIe et XIVe s. et proches des papes d’Avignon. Après une conférence sur le sujet, Marie-Elise Gardel entraînera le public dans les rues de La Livinière, pour une visite commentée en détail.

Après chaque intervention, le public sera invité à poser ses questions au chercheur, tant sur le bilan des découvertes effectuées à ce jour que sur les découvertes attendues. Toutes les conférences ont lieu à Siran, salle de conférence de la Mairie, ex maison du Minervois, ainsi que l’atelier d’archéopoterie. L’exposition sera présentée à la médiathèque de La Livinière, et les visites se dérouleront le samedi à Minerve (site du dolmen des lacs, musée archéologique), et le dimanche à La Livinière.

Crédit photo: Christian Douillet, Sophie Quencez, Marie Vallée-Roche.